Avec Sochaux, le Progrès monte au Filet

Depuis cet été, le Progrès Niederkorn a noué un partenariat avec le FC Sochaux-Montbélliard, club de Ligue 2 en France. La collaboration entre les deux clubs prévoit notamment de se prêter des joueurs. Elias Filet et Alex Guett Guett sont les deux premiers à avoir franchi la frontière luxembourgeoise. À mi-saison, l’heure du bilan a sonné.

Avec Elias Filet, le Progrès Niederkorn a attiré dans ses rangs un gros poisson de la formation sochalienne. Élu meilleur joueur du centre de formation du FC Sochaux, le jeune attaquant de 20 ans a conclu l’exercice 2021-2022 au rang de meilleur buteur du championnat de National 3 Grand Est avec 14 buts et 1 passe décisive en 24 matchs. « Je l’avais repéré en début d’année, quand je suis allé à Sochaux », se souvient Thomas Gilgemann, président du Progrès. « J’assistais à une opposition réduite de l’équipe réserve avec Raphaël Scherrer, le coordinateur du recrutement. On avait besoin d’un attaquant de pointe et d’un défenseur central pouvant évoluer à droite. Florian Bohnert a failli partir et on voulait anticiper d’autres départs, comme Lamine Ba. J’ai tout de suite remarqué Elias et j’ai dit à Raphaël « il vient de mettre plusieurs buts lui devant là, il est vraiment pas mal ». C’est là que j’ai su que c’était le meilleur buteur du groupe en N3 ». Le Progrès a continué à suivre l’attaquant et Alex Guett Guett, polyvalent défenseur central correspondant au profil recherché. « On ne peut pas valider un transfert sur un entraînement de deux heures. »

Niederkorn, work in progress

Ce partenariat est la nouvelle étape du projet de restructuration entamé il y a cinq ans. « On voulait s’installer régulièrement dans le top 5 et disputer des matchs européens. Au bout de quatre ans, on a réalisé plusieurs transferts à l’étranger comme Marvin Martins, les frères Thill. On voit que ça fonctionne et que nos joueurs ont le niveau pour jouer dans des premières ou deuxièmes divisions européennes », explique Thomas Gilgemann. « On s’est demandé comment on pouvait aider davantage ces joueurs et ainsi élever le club. De là est née l’idée d’un partenariat pour avoir un argument supplémentaire dans notre discours au moment d’attirer des joueurs chez nous ». Le Progrès cherche alors un club selon des conditions bien précises : à 3h de route ou 300 kilomètres maximum pour respecter une logique de proximité et un club n’ayant pas de partenariat. Un agent fait la mise en relation avec Sochaux et le tour est joué. « Des clubs comme Strasbourg et Reims étaient trop hauts pour nous. Metz est proche, mais on ne les a pas trouvés plus intéressés que ça. Ils travaillent déjà avec le Racing, en plus de Seraing et Génération Foot. On voulait un club partenaire officiel. Il y a le sportif mais il y a aussi l’humain et humainement, on se ressemble. Avec Sochaux, j’ai rencontré les hauts dirigeants et j’ai senti qu’on pouvait collaborer. »

« C’est L’opportunité pour les jeunes de développer leur potentiel et de revenir au club avec un autre statut. »

RAPHAËL SCHERRER, COORDINATEUR DU RECRUTEMENT AU FC SOCHAUX

Dans le Doubs, cette alliance grand-ducale est « le fruit de rencontres et de compétences pour un projet gagnant-gagnant », selon Raphaël Scherrer. « C’est l’opportunité pour les jeunes de développer leur potentiel dans un autre environnement et de revenir au club avec un autre statut. Au Progrès, ils peuvent être confrontés chaque semaine avec des adulte. En fonction des profils intellectuels et sportifs, il n’y a pas mieux qu’un départ à l’étranger pour apprendre leur métier et s’épanouir, notamment dans un championnat qui facilite l’adaptation grâce à la langue ». La proximité a également été un facteur déterminant pour permettre au FC Sochaux « d’avoir un œil assez proche pour suivre le développement des joueurs ». Arrivé au début du mois de juillet à Niederkorn, Elias Filet avait pourtant l’embarras du choix de l’autre côté de la frontière. « J’avais plusieurs offres en National notamment, mais je sentais une saison compliquée à venir avec les six descentes », confie le numéro 13. « Le Progrès était le club où je sentais le plus d’intérêt, celui qui me voulait le plus et ça a fait la différence. C’est un club qui joue les premiers rôles et ici, je ne suis plus le jeune du centre, je suis un joueur à part entière. »

Auteur d’un doublé contre Dudelange, Elias Filet a disputé l’intégralité des quatre matchs au mois d’août et a été élu joueur du mois, au sein de son club. © Progrès Niederkorn

Progrès Niederkorn – FC Sochaux, mode d’emploi

Dans le cadre du partenariat, quelques jeunes pépites de Sochaux sont prêtées au Progrès pour s’aguerrir. Seulement une poignée. « Ça prend exactement la direction que l’on souhaitait. Quatre joueurs maximum sur un effectif de 24 joueurs serait l’idéal », analyse Thomas Gilgemann. « Il faut mettre des limites pour garder une cohérence dans la stratégie. On pourrait avoir vingt Sochaliens, aussi bons soient-ils, on ne pourrait pas jouer le top 5. Il faut de l’expérience, une alchimie. D’ailleurs, on ne s’interdit pas de faire venir un joueur d’expérience qui aurait besoin de se relancer après une blessure, par exemple. On a l’avantage de pouvoir potentiellement disputer des matchs de Coupe d’Europe, ce qu’un joueur de Ligue 2 ne pourra jamais connaître en France ». Des joueurs du Progrès peuvent également faire le trajet en sens inverse et aller toquer à la porte de la Ligue 2. « Sochaux était très intéressé par Florian Bohnert, mais compte déjà dans ses rangs deux joueurs au même poste. Il n’y avait aucun interêt, pour le joueur comme pour les deux clubs. Sofiane Ikene est parti en stage là-bas, mais il a malheureusement ressenti une gêne aux ischio-jambiers le matin du premier entraînement. Ce n’est que partie remise. »

« L’objectif est d’intégrer tout notre club à cette collaboration. »

THOMAS GILGEMANN, PRÉSIDENT DU PROGRÈS NIEDERKORN

Cette saison, des éducateurs du Progrès vont effectuer un séjour de deux jours en terre sochalienne pour assister au fonctionnement du centre de formation et assister à des séances d’entraînement des jeunes, dirigées notamment par des anciens de la maison comme Pierre-Alain Frau chez les U19 ou encore Mickaël Isabey. « L’objectif est d’intégrer tout notre club à cette collaboration. On va aller à leurs tournois, eux viendront aux nôtres. On a aimé voir des anciens pros dans l’encadrement, cet aspect familial », raconte le président du Progrès. Des matchs amicaux sont également prévus, à domicile comme à l’extérieur. Le Progrès défiera la réserve du FC Sochaux, pensionnaire de National 3, le 28 janvier prochain à Niederkorn. « On suit particulièrement un joueur pour l’été prochain, un ailier. Sochaux souhaite qu’il poursuive son développement en N3. Ce match va nous permettre de voir à l’œuvre les joueurs que l’on surveille en situation de match pour avoir une idée de leur niveau. Eux, ça leur permet de découvrir où ils mettraient les pieds en cas de transfert. »

Thomas Gilgemann aux côtés d’Alex Guett Guett, deuxième Sochalien à rejoindre les rangs du Progrès. © Progrès Niederkorn

Comment les joueurs sont-ils ciblés ?

De chaque côté, des propositions de joueurs sont effectuées. Le Progrès établit des besoins à des postes bien précis et soumet des noms de joueurs observés pendant les séances. Le FC Sochaux agit en toute transparence et se permet de refuser certaines pistes à leurs homologues luxembourgeois, notamment pour des joueurs qui ne signeront pas professionnel par exemple. Côté français comme côté luxembourgeois, chacun a la priorité sur des cibles potentiels mais ne barre pas la route à des transferts vers d’autres clubs. Cette saison, Alex Guett Guett est le deuxième joueur à avoir provisoirement quitté la Franche-Comté pour rallier le Grand-Duché. « Je suis venu au Progrès pour faire un essai. Ils ont décidé de me conserver, donc j’ai accepté d’être prêté ici », détaille le joueur de 20 ans. « Je connaissais un petit peu le championnat car j’ai des amis qui ont joué ici. Je savais que ça parlait français, donc je me suis dit que c’était une bonne chose pour moi pour engranger de l’expérience ». En franchissant la frontière, Le polyvalent défenseur a retrouvé Elias Filet, dont le chemin ne cesse de s’entremêler au sien. « On jouait ensemble à l’AS Meudon, en région parisienne, à 17 ans et avant ça, on s’était déjà affronté », confie Elias Filet. « On s’est rapproché à Sochaux. Ici, il dormait chez moi en attendant d’avoir son appartement. On parle beaucoup, on se soutient. C’est une bonne chose de pouvoir compter sur lui et d’avoir quelqu’un à qui me confier. S’il n’était pas, je me sentirai un peu plus seul. Sur le terrain, il joue davantage dans l’axe, mais quand il joue latéral, il m’envoie des bons centres ». Le joueur d’origine camerounaise s’est rapidement imposé en début de saison, au point de devenir indéboulonnable dans le onze de Jeff Strasser en charnière centrale. « Je me suis rapidement intégrer au groupe. Le niveau est totalement différent de la N3, mais je m’y suis habitué. J’ai gagné la confiance du coach et j’ai enchaîné de belles performances. Même si j’ai un peu moins bien fini cette phase aller, ça s’est super bien passé dans l’ensemble », analyse Alex Guett Guett.

 « J’espère marquer autant de buts sur la phase retour. »

ELIAS FILET, ATTAQUANT PRÊTÉ PAR LE FC SOCHAUX AU PROGRÈS NIEDERKORN

Solide derrière, le numéro 18 peut compter sur Elias Filet pour enquiller les buts. Titulaire au mois d’août, avec notamment un doublé face à Dudelange, le jeune attaquant avait perdu sa place en septembre pendant deux rencontres, avant de réintégrer le onze de départ. Au total, le natif de Paris a participé aux 15 rencontres de championnat – et au 5e tour de Coupe contre Käerjeng – et a déjà inscrit 10 buts en BGL Ligue. Presque autant que ses 14 caramels de la saison dernière en National 3. « J’ai bien commencé, ensuite j’ai connu un trou d’air, mais sur les derniers matchs, c’est bien reparti », décrypte Elias Filet. Sur les deux dernières journées, la pépite sochalienne s’est offerte deux doublés, à Differdange et face à Mondorf. « Il a fallu que je m’intègre. Je suis un joueur qui a besoin d’être servi, qui a besoin d’automatismes. C’est venu avec le temps. Je trouve qu’on a souvent la balle. Au début, c’était stérile, mais maintenant on joue de mieux en mieux et l’équipe a bien assimilé les idées du nouveau coach ». Du haut de ses vingt ans, le jeune attaquant quitte pour la première fois son deuxième cocon familial du centre de formation. « Au début, j’appréhendais le changement de pays mais finalement, c’est similaire à la France. C’est la première fois que je vis seul, où je me fais à manger, j’établis mes programmes pour la semaine. J’ai réussi à m’adapter rapidement à tous ces changements. J’espère marquer au moins autant de buts sur la phase retour. »

Guett Guett et Filet, so chauds !

À Sochaux, les performances des petits poulains issus du centre de formation ne passent pas inaperçues. Raphaël Scherer se déplace à Niederkorn au moins une fois par trimestre pour assister en personne aux performances des deux joueurs sochaliens. « L’idée est de faire au moins un match en présentiel par trimestre », explique le coordinateur du recrutement de Sochaux. « On suit également les joueurs à distance en revisionnant les matchs sur Wyscout. Le président me fait également un retour sur le côté humain, l’investissement des joueurs. Le bilan est positif dans plusieurs domaines : le temps de jeu, la valorisation du projet, les statistiques. Humainement, on sent des garçons épanouis. Maintenant, il faut confirmer ». Pendant la trêve hivernale, le staff du Progrès doit fournir un rapport écrit et détaillé à son homologue franc-comtois. Le mercato du mois de janvier ne devrait pas s’agiter entre les deux clubs, sauf retournement de situation. L’objectif est de travailler ensemble à long terme. « On considère que c’est le club idéal pour nos jeunes en période de développement pour s’épanouir. Pour le Progrès, ce partenariat permet de récupérer des joueurs qui seraient plus chers par rapport à la rentabilité sportive. »

Le Progrès Niederkorn, nouveau satellite du Luxembourg ?

Le succès sochalien donne des idées à la direction du club de Niederkorn. Des discussions sont avancées avec un club de deuxième division hollandaise et le Progrès prospecte également du côté de ses frontières, en Allemagne (2. Bundesliga, la deuxième division allemande) et en Belgique (D1B, ladeuxième division belge). Avec toujours le même objectif : faire grandir le club et son attractivité pour attirer les meilleurs joueurs dans ses filets.

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