Jean-Sébastien Dauch (DG FLA) : « Il faut que l’on se professionnalise davantage »

Le directeur général de la FLA s’est confié à MENTAL! sur cette année 2020 forcément lourdement impactée par la crise du coronavirus, ainsi que sur la relance prévue en 2021. Entretien.

On se doute que, comme pour tous les sports, l’impact du Covid sur la FLA a été conséquent. Pourriez-vous nous faire une sorte de résumé des répercussions de cette année 2020 difficile sur la FLA aujourd’hui ?

Avant tout, il faut bien se rappeler que l’arrêt a été brutal et que personne n’était vraiment préparé face à cette situation, à l’image du confinement. Le premier impact a évidemment été l’arrêt des entraînements programmés par les clubs ou par la fédération, donc à savoir les entraînements nationaux, des centres de formation, ainsi que le sport au lycée. Il a donc fallu se réinventer pour essayer de maintenir une certaine activité, notamment chez les jeunes. Nous avons par exemple essayé de faire des publications sur Facebook avec des programmes et séances d’entraînement réalisables à la maison. On a aussi conclu un partenariat avec la Fédération française d’athlétisme, qui a plus de moyens que nous. Cela nous a permis d’utiliser leur support, qui est beaucoup plus ciblé que le nôtre, par catégories d’âge par exemple.

Ensuite, il a été compliqué de préparer un projet de déconfinement progressif, car personne ne savait réellement comment ou quand le mettre en place avec un futur incertain devant nous. Il a donc fallu essayer de reprendre progressivement, mais surtout d’apprendre à chaque étape comment gérer le monde, les catégories, utiliser des horaires décalés pour se conformer aux mesures sanitaires et éviter d’accueillir trop de monde. La difficulté qu’on a le plus rencontrée a été de faire reprendre les plus jeunes qui, au début, avaient du mal à respecter les gestes barrières et avoir la discipline nécessaire face à cette situation délicate.

Vous parlez d’utilisation des réseaux sociaux, de partenariats, de moyens novateurs pour faire face à la situation et préparer la relance. Pensez-vous que ces méthodes continueront d’être utilisées dans le futur, quand le pays sera définitivement sorti de cette crise ?

On a tiré plusieurs leçons de tout ceci. La première, c’est qu’il y a un réel intérêt à communiquer de façon ciblée avec les licenciés. On doit continuer sur cette voie et se moderniser davantage pour avoir une réelle base de données pour, par exemple, réussir à contacter tous les enfants de moins de 10 ans via une publication spécifique. Notre ancien système permettait d’accéder seulement à ceux qui étaient proactifs et non pas les licenciés moins actifs. Il faut donc continuer de moderniser notre communication afin de la rendre plus ciblée et, par conséquent, plus adéquate.

À titre d’exemple, nous collaborons en ce moment avec l’ENEPS et le gouvernement, qui vont sortir une application pour tous les sports, qui permettra de donner accès à un certain nombre de supports à tous, que ce soit entraîneurs, athlètes, jeunes ou parents. Ce sera une application d’entraînement. Par exemple, si vous commencez à entraîner ou encadrer des jeunes, l’app vous permettra de trouver des entraînements adaptés en fonction de l’âge ou du niveau. Il est certain que plus vous aidez et offrez du soutien à des entraîneurs potentiels, plus il sera alors facile pour eux de se lancer et s’investir.

Ce projet était déjà dans les cartons avant le Covid, et cette crise a mis un grand coup d’accélérateur. On est en ce moment sur le bêtatest, et on espère que l’application sera disponible au public dans les deux mois. Le contenu, dans un premier temps, ne sera pas aussi riche qu’on le souhaite, faute de moyens, mais par la suite, l’application devrait s’enrichir. Une conférence de presse du ministère des Sports devrait l’annoncer officiellement dans une soixantaine de jours.

Cela va faire maintenant 10 mois que le coronavirus influence grandement notre vie. Nous voici en janvier 2021 : dans quel état d’esprit êtes-vous ? Optimiste, optimiste réservé ou pessimiste ?

« Optimiste réservé », c’est pas mal comme expression ! Optimiste, car on semble en partie voir le bout du tunnel, avec une certaine reprise d’activité un peu partout en Europe, même si c’est dans des conditions très particulières et très différentes d’il y a un an. Un retour est clairement là, ce qui incite à l’optimisme. Après, oui, réservé malgré tout, car on ne sait pas encore à quelle échéance on va retrouver une certaine « normalité » pour tous.

Vous êtes-vous senti soutenu par le gouvernement durant toute cette période ? Ou voyez-vous des axes d’amélioration sur lesquels il faudrait se pencher ?

Déjà, je tiens à le rappeler, personne ne s’attendait à une telle crise. Si le gouvernement était peut-être plus prêt que nous, ça restait une nouveauté pour tout le monde, un terrain inconnu et compliqué. On a été énormément soutenu par le ministère des Sports, dans le sens où on a beaucoup travaillé avec eux sur la phase de déconfinement, avec beaucoup de dialogue. Il y a eu une excellente réactivité par rapport aux nouvelles annonces ou mesures et les conséquences qui en découlaient. Cela a été d’une grande aide pour nous d’avoir une « guideline » en tant que fédération, quand bien même il a fallu s’adapter en fonction des sports et des avancées incontrôlables.

On a vu, en particulier pendant le premier confinement, un taux élevé de gens de tout âge pratiquant la course. Si la FLA englobe plus que toutes ces activités, est-ce que vous pensez que, sur le long terme, il est possible de créer une émulation et arriver à une augmentation du nombre de licenciés dans diverses catégories ?

Peut-être. Il est encore un peu tôt pour le dire, car on n’a pas encore repris de manière classique. Ce que l’on voit surtout à l’heure actuelle, c’est une fragilisation des licences chez les jeunes, ce qui est inquiétant. Après, j’ai remarqué comme tout le monde qu’il y avait en effet plus de gens qui couraient, marchaient, prenaient soin d’eux, donc il est possible qu’il y ait un impact positif sur la pratique sportive des habitants. Donc oui, je l’espère, mais ce sera à nous de sensibiliser tout le monde à comment accueillir ces gens. Ce qui est certain, c’est que c’est le début d’une activité sportive pour beaucoup et que c’est à nous de les encourager à la développer.

Une autre des facettes négatives du coronavirus a été la diminution du nombre de bénévoles. Avez-vous été victimes de ceci et à quel point est-ce pénalisant pour la FLA ?

C’est en effet une grosse crainte de notre part. On a déjà eu quelques cas dans notre comité où des gens ont redécouvert le plaisir d’être en famille le week-end au lieu d’être sur les stades d’athlétisme en tant que bénévoles. Certains ont donc voulu prendre du recul à différents degrés, ce qui est absolument compréhensible, mais, effectivement, on ne peut que constater une diminution. La plupart de nos juges ont aussi un certain âge, ce qui engendre une réticence à continuer de participer à des activités collectives, faisant partie de la population plus à risque. Si l’on a noté un certain désengagement, il est néanmoins difficile d’en connaître l’importance pour le moment.

Une perte sur le long terme serait profondément gênante pour le fonctionnement de l’athlétisme dans tout le pays. Dans les clubs, la très grosse majorité des gens sont bénévoles. Nos juges le sont, ainsi que les membres du comité directeur de la fédération. On a besoin de ces bénévoles pour organiser les compétitions et le bon fonctionnement de la fédération. C’est une vraie difficulté. Moins de juges amène à moins de compétitions, tout comme moins d’entraîneurs implique moins d’athlètes. Et ainsi de suite…

Pensez-vous que c’est un problème temporaire ou plus permanent ?

J’aimerais dire que ça va revenir, mais c’était déjà une tendance de fond malgré tout. Trouver des bénévoles était de plus en plus difficile. Si on arrive à capitaliser sur de nouveaux arrivants, on devrait pouvoir retrouver de nouvelles personnes. Est-ce que cela compensera le départ d’autres ? Dur à savoir. Ce qui est certain, c’est qu’en tant que fédération, il faut que l’on se professionnalise davantage pour éviter d’être dépendants de façon trop importante des bénévoles.

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