Simon Béot : « Nous sommes à un tournant »

Analyse du développement du football au Grand-Duché, tant sur les pelouses qu’autour, avec Simon Béot, fondateur de Mental en 2017.

Quelle est votre vision sur la médiatisation du football, en particulier de la BGL Ligue à l’heure actuelle ?

Notre football est visible, nous ne pouvons prétendre le contraire. Plusieurs médias sont sur le pont chaque week-end pour couvrir la BGL Ligue et quelque fois la PH. Alors oui, certains, comme le Wort et le Tageblatt en font beaucoup moins que par le passé mais ils ont été remplacés par d’autres. Je pense évidemment à Dribble et mental.lu mais aussi au site FUPA.Lu, le Quotidien, qui a toujours très bien suivi le foot et l’Essentiel qui relaie les infos principales. Le streaming est arrivé il y a peu avec RTL et Live arena et c’est une bonne chose. Finalement, les médias, à des degrés différents font plutôt le job avec du print, du digital et de la vidéo. 

Le Luxembourg a t-il un championnat suffisamment attractif pour garantir une bonne visibilité  ?

La question que je me pose est la suivante : est-ce que la visibilité du foot dépend du bon travail des médias ou du bon travail des clubs ? Les médias sont le contenant et les clubs en fournissent le contenu. Les deux sont donc importants. Il me semble tout de même qu’il nous sera difficile d’augmenter notre lectorat si le niveau et les performances stagnent. Les audiences n’ont jamais été aussi bonnes que lors des belles victoires de l’équipes nationales ou du F91 en coupe d’Europe en 2018 et 2019.

Cela dépend donc du niveau de notre championnat. Mais alors comment évaluer notre niveau ? 

Pas seulement mais c’est une composante importante. Pour évaluer notre niveau, plusieurs critères sont à prendre en compte : nombre d’internationaux locaux et étrangers, qualité du jeu, qualité des pelouses et des infrastructures, qualité de l’accueil des spectateurs… Il est important aussi d’avoir un championnat à suspense pour le titre et les places européennes mais aussi pour le maintien. on a enfin toujours besoin d’avoir quelques clubs locomotives et quelques « joueurs stars ». L’indice UEFA ( et son évolution sur les dernières années ) est aussi révélateur, ainsi que la présence de clubs en coupe d’Europe. 

Ces 20 dernières années, le niveau de l’équipe nationale a  beaucoup progressé. Est-ce que la progression de notre championnat est la même ?

C’est très compliqué de lier les deux. Effectivement, le travail fait par la fédération a été de grande qualité et a fourni d’excellents résultats, notamment sur la formation. L’équipe nationale en a récolté les fruits et de nombreux joueurs ont acquis le statut de professionnels dans de bons championnats européens. Maintenant, est-ce que le football de club a profité de ce travail… je n’en ai pas l’impression. Est-ce que nos espoirs peuvent faire leur post formation dans nos meilleurs clubs, je ne pense pas. Les jeunes veulent tenter leurs chances dans un centre de formation à l’étranger. Mais si l’équipe nationale a progressé de façon spectaculaire, je ne vois pas pourquoi notre football de club pourrait ne pas faire de même. Il est primordial que nous puissions placer régulièrement une équipe de BGL en phases de groupe de coupes d’Europe et notamment de la nouvelle C4. Cela validera les progrès entrevus lors des 5-10 dernières années.

Etes-vous inquiet d’une visibilité diminuée ?

Non, pas du tout, je ne pense pas que dans les années à venir, le football ait moins de visibilité. Bien au contraire. Pour notre part, nous venons de lancer une newsletter hebdomadaire 100% foot, le journal DRIBBLE! sort entre 14 et 16 éditions par année et nous préparons un podcast Dribble! accessible dans les prochaines semaines. Nous n’avons pas l’intention de ralentir le rythme. Et je serai très étonné de voir nos confrères diminuer leurs efforts. 

Est-il envisageable que les clubs puissent recevoir un jour des droits TV 

J’espère pour les clubs que ce sera possible prochainement, cela permettrait de franchir un cap à toutes les divisions. Selon RTL, dans l’immédiat, cela leur semble impossible. Un autre acteur de l’audiovisuel peut arriver et amener de la concurrence. Attendons le prochain appel d’offre – s’il y en a un – mais c’est une piste.

Peut-on voir de nouvelles avancées dans le futur ?

A la rédaction, un sujet nous passionne : le statut professionnel du football luxembourgeois. Certains dirigeants m’ont ri au nez lorsque j’ai posé la question d’un possible passage à un statut professionnel de certains de nos clubs. Clairement, si nous souhaitons un championnat plus médiatisé, il nous faut plus de spectacles, plus de qualités, plus de tout. Le travail des clubs est admirable avec leurs moyens mais nous sommes à un tournant. J’ai l’impression que notre plafond est atteint dans ce système semi-professionnel. Soit nous progressons et nous franchissons un cap par le professionnalisme, soit nous serons condamnés au mieux à stagner si rien ne bouge à ce niveau. 

N’est-ce pas utopique d’espérer que tout le monde aille dans la meme direction ? 

Certains sont ambitieux, d’autres le sont moins. Mais nous croyons à la volonté de progression du football luxembourgeois. Nous nous portons volontaire pour relayer les actions des clubs, des dirigeants et des institutions qui tiennent la même ligne que nous pour augmenter l’attractivité et la médiatisation du football dans notre pays. 

Le Dribble d’Or sera t-il reconduit l’an prochain ?

Oui bien sur, l’édition 2021 était, de notre point de vue, une vraie réussite. L’édition 2022 est déjà au programme, mais je vous fais part d’une grande hésitation. Nous avons voulu faire comme pour le ballon d’or en organisant ses récompenses sur une année civile et ainsi remettre les trophées en décembre.  Et comme pour le ballon d’or, nous estimons que donner des récompenses basées sur une fin de saison et un début de saison est « spécial » Il se peut que nous fassions preuve de bon sens et récompensions les joueurs sur une seule et même saison et cela impliquera d’organiser les cérémonies du Dribble d’or en mai ou juin. 

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